Ether Energy est une jeune société créée par et pour des propriétaires terriens, développant des projets d’agrivoltaïsme. Elle a pour mission de participer à la transition énergétique européenne par la création de champs photovoltaïques éco-responsables, ayant un impact positif sur la biodiversité, tout en soutenant l’agiculture.
Nous avons rencontré Pierre de Liedekerke, l’un des trois co-fondateurs, qui nous présente sa société et, de façon concrète, les solutions qu’elle propose.
Qu’est-ce qu’Ether Energy ?
Ether Energy est une société indépendante qui développe des grands projets photovoltaïques en France, Belgique et Luxembourg.
Notre approche part des intérêts de propriétaires terriens, en valorisant plusieurs types de terrains tout en préservant les paysages, le patrimoine ou les activités comme l’exploitation agricole.
L’agrivoltaïsme est l’une de nos grandes spécialités. C’est une activité innovante consistant à faire cohabiter une exploitation agricole et photovoltaïque sur un même terrain. Cela peut paraître impossible car on imagine que les panneaux empêchent la végétation de pousser dans les champs ou les pâtures. En réalité, des techniques particulières permettent de préserver la production agricole et de garantir une cohabitation harmonieuse des deux filières. C’est, par exemple, le cas en supprimant une rangée de panneaux sur deux, en les surélevant, ou en les fixant sans utiliser de béton.
Comment est né votre projet ?
Lorsque nous avons créé Ether Energy, notre souhait était de contribuer à l’accélération de la transition énergétique grâce aux grandes installations photovoltaïques au sol. Celles-ci permettent d’installer une source d’énergie renouvelable à grande échelle, tout en étant compatible avec la préservation de la beauté des paysages européens.
Lors de nos recherches, nous nous sommes rapidement intéressés au potentiel de la zone agricole qui représente la plus grande partie de terres en Europe. Dès le début de notre réflexion, nous avons été très sensibles aux enjeux liés à l’agriculture : maintien de l’activité nourricière, accès aux terrains pour les jeunes agriculteurs, spéculation sur le prix du foncier, amélioration de la biodiversité et transition vers une agriculture biologique.
Nous avons été très heureux de constater que l’agrivoltaïsme était déjà un sujet bien développé dans d’autres pays qui ont réalisé des recherches scientifiques approfondies en la matière. C’est le cas des États-Unis, du Japon et de l’Allemagne pour citer les meilleurs élèves de la classe.
Ces recherches nous ont poussés à croire au potentiel élevé de la cohabitation entre l’agriculture et le photovoltaïque.
Quels sont vos parcours ?
Alex Houtart est expert en finance durable. Juriste de formation à l’Université Catholique de Louvain (UCL), il cumule vingt années d’expérience en finance. Il a notamment dirigé le département des opérations internationales sur trois continents et développé la stratégie de finance durable pour BNP Paribas Fortis, combinant des portefeuilles de projets responsables et d’obligations vertes d’une valeur de cinq milliards d’euros. Il enseigne la finance durable à l’ICHEC (école de gestion à Bruxelles).
Jose Luis Aguirre détient un master en ingénierie civile et électrique de l’Université Libre de Bruxelles (ULB). Il possède une expérience unique de quinze ans dans le secteur de l’énergie renouvelable, ayant participé activement au développement, au financement et à la construction de deux mille cinq cents MWc (Mega Watt Crètes) de projets en Amérique Latine, Europe et Moyen Orient.
Je détiens un bachelier en gestion d’entreprise et un master en finance à l’ICHEC. Fort de dix années d’expérience dans l’énergie, les matières premières et l’agro-business, j’ai notamment travaillé pour des entreprises internationales en Europe et en Afrique.


Pourriez-vous nous présenter l’un de vos projets ?
Le projet que nous développons au château H dans le Centre-Val de Loire illustre bien notre démarche.
Il s’agit d’une propriété composée d’un château médiéval, d’un ensemble d’immeubles à rénover et d’une centaine d’hectares de terres agricoles.
Les terres agricoles sont, dans leur ensemble, des pâtures. L’activité agricole consiste principalement au pâturage de moutons qui est une spécialité régionale depuis des décennies. La famille souhaite maintenir cette activité et entretenir de bons rapports avec le voisinage. Toutefois, comme dans la majorité des cas, les revenus du domaine – notamment le fermage – ne permettent pas de couvrir les frais d’entretien du château et des dépendances.
La famille s’est alors intéressée à l’activité touristique autour du château. Elle pourrait être relancée mais nécessite des investissements importants dans la rénovation d’anciens bâtiments qui pourraient servir d’hôtel, de restaurants et de gîtes. Un projet d’énergie renouvelable était une piste intéressante mais les éoliennes sont tout à fait incongrues à proximité d’une demeure historique.
C’est dans ce contexte que nous avons rencontré la famille. L’idée était de créer un projet intégré qui permette le maintien de l’exploitation ovine tout en dégageant un revenu permettant d’investir et d’entretenir le domaine. Bien entendu, le projet devait être aussi discret que possible pour ne pas compromettre la beauté des paysages et les alentours de la propriété.
Nous avons d’abord rencontré les agriculteurs pour prendre leur avis en considération. Nous avons montré comment faire pour permettre le maintien de l’élevage de moutons malgré la présence des panneaux. Une fois rassurés, ils nous ont fait part de deux craintes : la concurrence de l’accès à la terre et des prix de location. Nous avons donc proposé de développer le projet ensemble afin qu’il soit compatible avec la présence des moutons et de prendre l’entièreté du loyer à charge du photovoltaïque. La terre est donc mise à disposition, gratuitement, de l’agriculteur. Cette opportunité a, tout de suite, suscité l’enthousiasme parce qu’elle permet de continuer l’exploitation sur le long terme, sans concurrence et en réduisant les coûts pour l’agriculteur.
Le champ agrivoltaïque avait d’autres avantages pour l’éleveur. Il permettait d’économiser les frais de clôtures qui doivent de toute façon être installées pour protéger les éléments électriques. La disposition particulière des panneaux permettait également d’abriter les bêtes et de les protéger de la pluie et du soleil. Nous avons même prévu de récolter l’eau de pluie qui s’écoule sur les panneaux pour abreuver les animaux en été et éviter les frais de transport d’eau.
En parallèle, nous avons rencontré les membres de la mairie pour tenir compte de leur point de vue dans le projet.
La première préoccupation principale était paysagère. Quoique beaucoup moins impactant que des mâts éoliens, un champ photovoltaïque semblait quand même envahissant. Il a fait l’objet d’une étude d’implantation spécifique pour rester invisible. L’endroit a été minutieusement choisi et entouré de haies naturelles permettant à la fois de masquer les panneaux et de créer des couloirs de biodiversité notamment pour la petite faune.
Nous avons enfin attaqué le volet touristique en essayant non pas de “limiter les nuisances” mais au contraire de créer des synergies. Le propriétaire du château à immédiatement souhaité réinvestir une partie du revenu des loyers de la centrale agrivoltaïque dans la rénovation de plusieurs bâtiments du village historique dans le but de recréer des infrastructures hôtelières et de restauration. Pour une fois, renouvelable et patrimoine avaient un intérêt commun. C’est finalement toute la dynamique locale qui a retrouvé un souffle nouveau grâce au projet.
Concrètement, quelles sont les contraintes et opportunités pour les propriétaires terriens ?
Le propriétaire n’a aucun frais mais c’est lui qui reste maître du projet.
Toutes les démarches sont prises en charge par notre société. Il est préférable que le propriétaire nous accompagne pour les premières rencontres avec les élus locaux et les agriculteurs.
Après cela, nous nous occupons de la gestion de développement du projet jusqu’à l’obtention du permis. Nous réalisons, également, le financement et la construction du projet.
Le propriétaire commence alors à toucher les loyers, indexés, pendant une durée de trente-cinq ans. C’est assez long mais finalement pas plus qu’un fermage.
Quelles sont les différentes étapes d’un projet ?
Lorsqu’un propriétaire nous appelle, nous effectuons d’abord une pré-étude de faisabilité. Si le projet est réalisable, nous proposons un contrat de développement au propriétaire qui en détaille les étapes. Nous créons le projet ensemble en abordant tous les volets.
La première étape officielle est la signature d’une promesse de bail (PdB). Ce document décrit tous les engagements du développeur et du propriétaire dans le développement du projet. La PdB donne une exclusivité au développeur pour réaliser le projet et fixe le niveau des loyers qui sera payé au propriétaire pendant la durée du projet. En cas de succès du développement, la promesse de bail engagera le propriétaire à signer un bail emphytéotique pour démarrer la construction du projet.
Dès que la promesse de bail est signée, nous lançons les études environnementales, agricoles et paysagères dans le but d’élaborer le projet agrivoltaïque le plus approprié mais également pour préparer les dossiers de demande de permis. Il faut prévoir en tout une durée de douze mois pour la réalisation complète des études, cela s’explique en partie par le fait que les études doivent s’étaler sur les saisons d’une année.
Ensuite, vient l’introduction du dossier de permis qui est réalisé en parallèle des études et dont l’instruction dure douze mois. Une des étapes importantes de la procédure de demande de permis est l’avis de la CDPENAF (Commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers) qui validera la faisabilité agricole du projet.
Après l’obtention du permis, nous faisons la demande de raccordement à Enedis (gestionnaire du réseau de distribution d’électricité en France) qui dure environs douze mois aussi. Après la réception de la solution de raccordement viable de la part d’Enedis, nous arrivons au stade prêt à construire (dit RTB pour “Ready to Build”).
A partir de ce moment, nous travaillons sur le closing financier qui comprend la commande du matériel et le financement bancaire de l’opération. Il faut compter environ quatre mois pour le closing et ensuite six mois pour la commande du matériel.
La construction peut ensuite débuter et dure environ huit mois.
Il faut donc compter un total de quatre ans, en France, entre la signature de la promesse de bail et la mise en service de l’installation. Les étapes sont similaires pour la Belgique et le Luxembourg mais la durée peut être plus courte en Belgique.


Qui sont vos clients ?
Nous travaillons principalement avec les propriétaires terriens disposant d’assez de surface pour mettre à disposition plus de vingt hectares pour un projet agrivoltaïque. Nous travaillons surtout sur la moitié nord de la France, au-dessus de l’axe Limoges – Lyon et jusqu’à Bruxelles. Pourquoi pas plus dans le sud ? Parce qu’il y règne une très grande concurrence sur les prix, dominée par des grands acteurs. Cette guerre des prix nécessite une rentabilité extrême entraînant une couverture très dense de panneaux qui souvent ne permet pas de maintenir d’autres activités.
Quels types de terrains pourraient convenir à vos projets ?
Nous essayons de valoriser tout type de terrains à faible rendement et d’une taille suffisante. La moyenne est de vingt-cinq hectares.
Les terrains que nous préférons sont donc logiquement les terres agricoles à faible rendements : prairies, pâtures, friches. Mais nous développons aussi des projets sur des terrains dégradés comme les abords d’autoroute, les anciennes décharges ou carrières, les sites pollués ou industriels.
Certaines installations d’énergie renouvelable sont critiquées pour leur impact environnemental négatif. Qu’en est-il de votre solution ?
L’écoresponsabilité est un principe fondateur de notre société.
Les panneaux que nous utilisons sont tous recyclables à au moins 95%, nous payons d’ailleurs un montant de deux euros à l’achat des panneaux pour préfinancer le recyclage qui est pris en charge par la société PV Cycle.
La fabrication des panneaux et leur transport reste un point d’attention. Aujourd’hui, l’énergie dépensée pour la construction et le transport d’un panneau est équivalente à un an de production d’énergie verte par le même panneau. Comme le panneau a une durée de vie de trente-cinq ans, le bénéfice net environnemental est en réalité parmi les meilleurs, toutes techniques de production confondues. Mais la filière pourrait encore faire mieux, notamment en réimportant massivement la fabrication en Europe.
Tous nos projets sont de conception “zéro-béton” et sont totalement réversibles permettant de retrouver le terrain dans son état initial. Les panneaux sont fixés au sol par des vis d’une profondeur d’un mètre et demi permettant d’ancrer durablement les panneaux pendant leur durée de vie.
Quels sont vos projets futurs ?
Notre projet est de réunir suffisamment de propriétaires pour devenir un grand producteur d’énergie verte indépendant et local, de manière à contribuer à deux objectifs européens : l’indépendance énergétique et la transition zéro carbone.
La capacité totale installée d’ici 2030 devrait avoisiner les 1.000 MWc, soit l’équivalent d’un petit réacteur nucléaire.
Nous sommes aussi en relation étroite avec la filière du stockage (batteries, hydrogène, etc) et les bornes de recharges pour véhicules électriques, particulièrement lorsque le champ solaire est situé à proximité d’un grand axe routier.
Nous souhaitons également aider le monde agricole dans sa transition vers une agriculture plus durable et plus respectueuse de l’environnement.
Pour en savoir plus, consultez le site internet d’Ether Energy.
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